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Le témoignage de Lilhyaleilla

L'agoraphobie me guettait depuis mon enfance!

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Issue d'une famille nombreuse dont des parents illettrés, cadette de 10 enfants, j'ai été confrontée très jeune à d'énormes responsabilités. Le mot "peur" est entré très tôt dans ma petite enfance, violence, rejetée, mise à l'écart sans savoir pourquoi. J'avais une peur bleue de mon père. Les nuits étaient devenues un calvaire, souffrance, cauchemars répétitifs, peur du noir, peur de l'isolement, le moindre bruit me faisait sursauter.

J'avais treize ans quand mon père a acheté un terrain à la campagne dans le dessein d'y construire une villa. En attendant, nous passions les vacances scolaires et les week-ends dans un cabanon en bois à faire de durs labeurs, trop de travail de force, trop de pression, trop de peurs.

À seize ans, je quitte ma ville natale pour aller vivre à la campagne où la construction de la villa est enfin terminée. Cet éloignement, en plus de devoir supporter la violence de mon père, c'était au-dessus de mes forces. On venait de m'arracher à mes racines, mes repères, la nostalgie de ne plus voir mes amies, j'étais très malheureuse.

Je me suis construit un rêve, je lisais des livres qui me permettaient de m'évader, d'oublier mes souffrances. Quand je rentrais du lycée le soir, il faisait nuit noire, il n'y avait pas d'éclairage. Il fallait faire trois kilomètres à pied dans la nature, mes peurs augmentaient de jour en jour, pour tout. J'avais développé déjà plusieurs phobies, je ne m'en rendais pas compte, ma famille me disait sans cesse: "tu es une vraie peureuse". Ils avaient oublié que c'était eux qui m'avaient attribué ces peurs! Je n'avais pas le droit d'avoir peur devant mon père, je devais les surpasser.

Un an plus tard, j'ai été bosser dans une maison de retraite pendant les vacances scolaires. J'étais confrontée à des situations très pénibles. Voir des personnes décédées me faisait peur, j'étais toute retournée.

Ensuite, à 19 ans, j'ai eu un accident de voiture qui m'a beaucoup traumatisée, j'ai mis plus de six mois à m'en remettre et reprendre le volant, j'étais très jeune. J'ai gardé cette peur très longtemps, j'évitais de passer sur cette fameuse route.

À vingt ans, j'ai fui mon père pour retrouver son double, je me suis jetée dans la gueule du loup "mon mari". Pendant dix-sept ans, il ne m'a pas épargnée, violence conjugale, coups et blessures, humiliations, abandon, sans oublier les grosses pressions familiales, (mon père, frères et soeurs). Ils dirigeaient ma vie, j'étais sous leur emprise, en fait, je n'étais pas un membre de leur famille. J'étais toujours montrée du doigt comme une pestiférée, mensonges, accusations, j'étais fautive de tout. Je n'avais pas le droit de me défendre, les menaces pesaient sur ma tête. Cosette à côté de moi était une reine. Je suis devenue mère poule, surprotectrice, je donnais tout mon amour et mon affection à mes enfants.

Avec le recul, je me rends compte en écrivant que j'avais développé une forme d'agoraphobie. En 1996, j'ai commencé à avoir des petites alertes d'attaques de panique. Mon médecin m'avait dit: "Vous êtes sur le fil de la dépression."

Septembre 1999: j'ai fait une fausse-couche, je ne voulais plus d'enfant. Je me suis séparée, j'ai perdu mes cheveux, mais j'ai gardé l'espoir qu'ils repoussent. J'ai subi toutes sortes de moqueries de part et d'autres, j'étais prête à porter une perruque.

Janvier 2001, je perds ma cousine dans un grave accident de voiture ce qui m'a bouleversée. Je n'arrivais pas à faire le deuil. Les cauchemars avaient repris toutes les nuits, je me réveillais en sursaut. Le vase commençait déjà à déborder.

Ma vie bascule soudainement!

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Un matin de mars 2001 ma vie a basculé! Je n'étais plus dans la réalité lors de ce cours théorique sur la respiration dans le cadre d'une formation en réanimation! Je me suis mise à focaliser sur elle et soudainement des pensées désastreuses m'envahissent de tous les côtés. La peur de mourir était omniprésente, le coeur qui se met à battre très vite, les mains et jambes qui tremblent. Que m'arrivait-il ? Je l'ignorais, mais j'étais persuadée que j'étais la cause de tout cela, que c'est moi qui m'étais provoquée cette panique à bord avec mes pensées sordides à me torturer le cerveau. La peur du regard et du jugement des autres m'a ramenée à la réalité. Mes nuits devenaient mes hantises, je ne voulais plus m'endormir! Je n'osais parler à personne de ce qui m'arrivait, j'avais honte de moi! Je ne me reconnaissais plus. Mon imagination avait pris le dessus. Je vivais chaque jour un scénario différent, venu tout droit de mes pensées les plus terrifiantes. Malgré tout, j'ai eu la force de finir mon année de DE (diplôme d'infirmière). Je travaillais dur, je dormais peu.

Attaque de panique? Pourquoi Moi?

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Huit mois plus tard, un dimanche après-midi, je vis un scénario d'épouvante. J'ai été prise de panique dans ma salle de bain. J'en suis sortie comme une folle, je me suis enfermée dans ma chambre, je tremblais, mon corps était froid à l'intérieur, mon coeur battait vite, mais je suis arrivée à regagner mon calme. Une heure plus tard, sur une route de campagne au volant de ma voiture, je suis terrassée par une autre foudroyante attaque de panique, je me vois mourir, je suffoque, j'ai du mal à respirer, je tremble de tout mon corps. J'ai arrêté la voiture, j'étais en plein milieu de la route, incontrôlable! J'ai fait signe aux voitures de s'arrêter! Ils ont dû me prendre pour une folle, je leur demandais d'appeler les secours. Je me meurs! Mais les secours ne pourront pas me sauver! J'avais besoin d'eux, mais en même temps j'avais peur qu'ils ne puissent rien pour moi! Je ne sais pas combien de temps c'est resté ainsi! Tout à coup, j'ai fondu en larmes devant ma fille qui n'avait que douze ans, elle ne comprenait pas ce qui m'arrivait. Je me souviens que c'est moi qui ai provoqué cet état de panique avec des pensées de peur. Je suis restée dans la voiture sans rien comprendre, je me disais: tu es folle, on va t'enfermer dans un asile psychiatrique, tu n'es plus toi-même. Comment vais-je faire? Ma fille ne sait pas conduire! Je ne peux pas la laisser ainsi, ce n'est pas possible! Mais l'instinct maternel a pris le dessus. J'hésite un moment et je reprends le volant. Arrivée chez mes parents, je me jette en gros sanglots dans les bras de ma mère. Je la regarde et lui dis dans mon jargon à moi: "Maman, aide-moi s'il te plait, il n'y a que toi qui puisses me guérir." Elle n'avait rien compris, mais ses mots, ses gestes m'ont complètement rassurée. Ma belle-soeur présente m'a donné un calmant (1/4 d'anxiolytique). J'aurais pris n'importe quoi, pourvu que ce cauchemar s'arrête là! C'était ma première erreur. Cela m'a bien calmée, j'ai repris la route. Arrivée chez moi, épuisée, je me suis endormie.

L'agoraphobie entre dans ma vie!

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Fin 2001: J'évitais de prendre les ascenseurs, de trop m'éloigner, mais je sortais, faisais mes courses dans les grandes surfaces. Le mal commençait à gagner du terrain! Comme un virus qui se prolifère en vous, mes parcours se limitaient, les grands immeubles me faisaient peur, la foule me faisait peur, les ponts, la mer. Mon imagination devenait débordante de scénarios catastrophes.

Puis finalement, l'angoisse est revenu au galop, je vais aux urgences, c'est mon coeur, j'ai peur. Tout va bien, Madame! Je vis un cauchemar ambulant! Je consulte un psychiatre qui me dit: ce sont des attaques de panique! Je lui demande si je suis devenue folle. Il me rassure. Sans me dire mon mal, il me met sous anti-dépresseurs, que je n'ai jamais pris. Je parlais à un mur, une machine à vous prendre de l'argent, je ne suis plus jamais retournée le voir.

J'ai consulté une psychologue qui m'a écoutée et qui m'a dit: "C'est tout ce que vous avez emmagasiné qui ressort de votre gorge." Certes mais je n'étais pas plus avancée. L'éloignement me posait des soucis, je sortais, mais accompagnée. Je devenais dépendante, je me voilais la face, je mentais, je trouvais excuse sur excuse.

Je sombre dans l'agoraphobie sévère.

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Avril 2002: Un beau jour, alors que j'étais au travail chez un patient, madame la panique vient me consulter. Je prends vite 1/4 d'anxiolytique que mon médecin de famille m'avait prescrit, une heure plus tard la panique revient. Je conduis, je n'en peux plus, je suis au bord du gouffre. J'arrête mon travail, je ne suis plus capable de continuer. Je laisse ma porte ouverte jour et nuit, je ne la ferme plus à clé, j'ai peur de ne pas pouvoir sortir de chez moi, d'être prise au piège. Je commence à dormir dans mon salon devant la télévision pour occuper mes pensées. J'abandonne ma chambre, je ne peux plus rester seule chez moi. Je n'arrive plus à entrer dans ma salle de bain, je me lave dans la cuisine avec deux bassines devant mon évier, en cachette le soir. Je développe des tocs (troubles obsessifs compulsifs), je vis la nuit, je dors le jour. Je ne peux plus regarder la télévision. Il faut toujours un téléphone à mes côtés pour être rassurée! Oh combien de fois j'ai appelé SOS médecin, combien de fois j'ai appelé l'hôpital psychiatrique pour qu'on me rassure! Je me laissais aller complètement à la dérive, je ne faisais même plus attention à mon apparence physique.

Mon père vient me rendre visite pour des papiers, il me dit: "Regarde-toi, on dirait une morte vivante." Mon seul ami était devenu mon PC, je me cachais derrière l'écran. La communication virtuelle m'apportait beaucoup. Je n'osais pas dire mon mal. Impossible d'aller chez ma voisine de palier ou à ma boîte aux lettres. La peur m'avait emprisonnée dans son emprise. J'étais entre les quatre murs de ma prison, je regardais l'extérieur à travers les barreaux. Ma famille ne comprenait pas ce que j'avais, ils ne voulaient pas comprendre. J'étais devenue la risée de tous, les critiques, les moqueries, mise aux oubliettes sans soutien moral. Mes enfants savaient, mais mon fils fuyait.

En mars 2003 mon père est hospitalisé d'urgence suite à un infarctus du myocarde. J'ai pleuré jours et nuits, je ne mangeais presque plus. Incapable de sortir de chez moi, je restais en liaison téléphonique avec les soins intensifs. Quelques mois plus tard, c'est ma mère qui est hospitalisée pour son diabète, le même schéma. Un soir, mon frère m'appelle (celui à qui j'ai sauvé la vie) et me met plus bas que terre. En larmes je lui explique mon mal. À quoi bon! Je ne vais pas vous citer les mots cruels que l'on a très gentiment donnés à ma personne. Les personnes qui me sont chères, qui ne m'ont jamais jugée, qui m'ont aidée durant ces années très dures, sont ma mère, ma fille et deux de mes soeurs. Je stagne pendant cinq ans sous anxiolytiques, je survis avec des hauts et des bas. Un visage livide, pâle, j'ai pris dix ans. J'ai accepté mon mal, cependant j'avais toujours espoir de m'en sortir un jour.

En janvier 2005, ma mère a subi une grave opération chirurgicale. Par téléphone, je me rends compte que ma mère va très mal, je demande son traitement. Une erreur, je ne pouvais pas me déplacer, par téléphone je sauve ma maman.

Mars 2005, mon fils sans comprendre ce qui m'arrivait, commence à me fuir, il dit à ses beaux-parents que je suis malade. Un jour il me dit: "Ma belle-mère m'a expliqué ce que tu as." Et pourtant, j'étais très cohérente et explicite sur mon mal. Peu importe, pour lui je n'étais plus intéressante, je ne travaillais plus, je ne sortais plus de chez moi. Il a fui la maison. À ses fiançailles, j'étais une étrangère, il avait honte de moi et ne m'a pas adressé la parole. À son mariage, il ne me connaissait plus et il a accepté que son épouse me traite de folle, des insultes très méchantes à vous détruire. J'ai réussi à me rendre à ces deux événements parce que ma mère, ma fille et mon ami étaient là près de moi et, bien entendu, mes anxiolytiques pas trop loin. J'ai dû faire des concessions à la peur lors de ces deux journées si importantes dans la vie de mon fils. Aux fiançailles, je ne suis restée que trois heures chez ses beaux-parents, après l'émotion était trop forte, je suis rentrée chez moi. Pour le mariage, je ne me suis pas rendue à la mairie, ni au parc pour prendre les photos, je me suis rendue directement à la salle qui n'était pas loin de chez moi. Même scénario, ma mère, ma fille, mes anxio. Ce jour-là je suis restée huit heures sans prendre d'anxio, j'ai oublié, car en fait, je pense que j'étais trop occupée à avoir des pensées...

Fin novembre 2006, un soir, mon fils me traite de folle au téléphone devant sa belle-famille et son épouse, car je m'inquiétais de ne plus avoir de ses nouvelles. Je tombe dans les pommes, vertige sur vertige, alitée pendant trois jours. En écrivant, j'en ai les larmes aux yeux. Pendant un an, il ne m'a pas donné signe de vie, ne s'est pas informé comment j'allais! J'étais épuisée de chagrin, de son silence.

Une semaine plus tard, en pleine nuit, j'ai des vertiges, j'ai peur, je fais deux grosses attaques de panique, je me suis vue mourir, mon coeur allait sortir de ma poitrine. Je ne réveille pas ma fille pour ne pas l'effrayer, j'appelle le SAMU, le médecin me dit: "Calmez-vous ce sont des angoisses aiguës, effrayantes et spectaculaires." J'étais complètement anéantie. Le lendemain je vais sur le moteur de recherche Google, je tape peur panique, attaque de panique, angoisse, tout ce qui me venait à l'esprit! Je tombe sur un forum, je lance un appel, SOS détresse, aidez-moi s'il vous plait!

L'espoir vient à moi de l'autre bout de l'océan.

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Décembre 2007: Voilà un an jour pour jour que je suis venue sur DTA.. Stanzie merci, tu m'as donné une renaissance, j'étais perdue sur un forum, je criais à l'aide, tu es venue me prendre, j'étais un oeuf dans sa coquille et tu m'as déposée sur le panier douillet de Déploie tes ailes. Tu m'as sécurisée par la documentation, mon mal s'appelait "agoraphobie". Tu m'as appris les techniques qui ont été mes premiers pas! Tu m'as boostée quelquefois pour mon bien (merci est un mot faible). C'est beau, l'humanisme, l'amitié à travers les frontières! J'ai trouvé toute une famille DTA formidable, réconfortante, qui m'a aidée jour après jour, qui me comprenait, sans me juger.

Sarah, ma fidèle coach et amie qui m'a donné espoir jour après jour, comme une seconde mère qui rassure son enfant, afin que je puisse m'épanouir, oublier toutes ces souffrances, ces peurs. Sarah, je lisais tous tes messages encourageants, oh oui comment pourrais-je oublier décembre 2006, où j'ai fait mon second grand pas dans une surface commerciale, j'ai pu aller juste au début du magasin, fière d'avoir acheté un cadeau de Noël pour ma fille, chose que je n'avais pas pu faire depuis cinq ans.

J'ai passé les quatre saisons sans aucune attaque de panique comme celles que j'ai connues, qui m'ont terrorisée, terrassée. La saison où j'ai eu le plus d'angoisse c'est l'automne, à partir du mois d'octobre. C'est le 21 octobre 2001 que j'ai eu ma première grosse panique. Je m'en souviens, je revois tous les détails, cela ne me fait plus aucun effet. Max s'est joint à moi pour écrire, il est très coopérant et sage!

J'ai surmonté bien des épreuves durant cette année, mon premier pas, c'est le départ sur DTA, quand j'ai commencé à ouvrir ma coquille pour affronter la réalité: "Vaincre mes peurs." Au début, tous les symptômes étaient là. Je m'exposais à des situations anxiogènes. J'ai travaillé sans cesse mes techniques, les points bleus, le ici maintenant, la respiration ventrale, la relaxation. J'ai lâché prise, plus de haine, plus de rancoeur! J'ai fermé cette porte sur le passé pour ouvrir celle sur les beaux horizons. Le pardon m'a permis d'acquérir la sagesse.

Ma première exposition: faire cinq mètres à pied accompagnée. Aujourd'hui je suis à 99% de mon autonomie, j'ai beaucoup appris et j'en retiens toutes ces leçons qui seront mes alliées de la vie, pour ne plus faire les erreurs du passé. Grâce à DTA, j'ai surmonté une très grosse épreuve en juin (le décès de ma mère), moi qui ne pouvais pas y croire! J'ai pris mon envol, le petit oeuf est devenu un bel oiseau, qui chaque jour, vole encore plus loin et sans crainte. Je reviens tous les jours voir ma grande famille sur DTA. Je vous aime tous!

On se libère de l'agoraphobie.

C'est l'automne, c'est ma plus belle saison. J'aime me promener dans les grands espaces, ces couleurs chaudes à mon coeur. Je reste des heures à contempler cette nature si belle qui me rend si heureuse, je suis libre. Je clôture ce chapitre de mes cinq années d'agoraphobie. Je vole maintenant vers de très beaux horizons. Ma liberté!

Je suis libre!

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Lilhyaleilla


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